Rendez-vous en terre inconnue

Attention, les informations suivantes sont précieuses, en effet, vous ne trouverez aucune information concrète sur le village de Ndadé en surfant sur internet, même Wikipédia n'en parle pas et Google Maps non plus. Alors laissez-vous porter jusqu'à cet endroit qui, généralement, reste inconnu même des plus intrépides. 


Le village de Ndadé est, pour rappel, le village choisi par l'organisation Afrique Développement (ADev). C'est l'association en partenariat avec l'AEAD, dont le Président est Daha Diallo. C'est lui qui est chargé de choisir le projet final à financer, après avoir reçu de nombreuses candidatures et propositions de projets à effectuer dans la région de Louga où son organisme oeuvre principalement. Je ne manquerai pas de vous présenter Daha, un homme chaleureux, drôle et touchant mais qui a la tête sur les épaules et comprend les enjeux nationaux et internationaux que ce soit au niveau politique, social ou familial aussi bien en Afrique qu'en Europe. Mais revenons à notre cher Ndadé aka mon pays imaginaire... 

"La deuxième étoile à droite, et tout droit jusqu'au matin" - Chemin vers Ndadé

Pour arriver à Ndadé, il faut prendre la route principale qui relie Potou à Louga. On emprunte cette direction pendant environ 10 minutes, le plus souvent, je suis à l'arrière du 4X4 conduit par Moussa, un des membres fidèles d'ADev, notre chauffeur et accompagnateur et désormais ami. A un moment inattendu, aux alentours de Léona, le 4X4 quitte la route pour s'aventurer sur un chemin non bétonné, sableux, au milieu de nulle part. Il n'y a qu'une seule voie tracée, celle marquée par des traces de pneus. C'est, en effet, un village en pleine brousse. Le paysage qui accompagne notre traversée reste magnifique bien que tout soit encore aride et sec parce que la saison des pluies arrive seulement. Néanmoins, l'endroit reste paisible car tout autour de nous, pas âme qui vive. Nos seuls compagnons de route sont les oiseaux et les troupeaux de chèvres avec leur berger qui roupille à l'ombre d'un arbre rare. Cette ambiance s'apprécie encore quelques minutes avant d'arriver à Ndadé, là où se dessinent deux constructions qui ont commencé quelques jours auparavant. 

Face à nous se dresse une seule installation exploitable qui pourtant se décompose à vue d'oeil. La salle de classe n'est faite que de paille et de morceaux de bois, un assemblage donc très rustique. Les conditions sont aussi bien pénibles pour les enfants que pour l'enseignant. En effet, le toit s'affaissant petit à petit, le professeur debout face à ses élèves doit constamment plier les genoux pour ne pas se cogner la tête. Sachant également que cette construction ne protège pas du vent, du sable et des animaux tels que les reptiles qui peuvent roder sur cette terre aride.

Salle de classe à notre arrivée

Le village de Ndadé est divisé en trois familles : Les Sow, les Ka et les Ba. Celles-ci sont séparées géographiquement à moins d'un kilomètre l'une de l'autre. L'emplacement de la nouvelle école et de la case de santé a été choisi judicieusement, c'est-à-dire à égale distance de chaque famille. La dénomination famille n'a pas la même référence que l'on utilise en Europe c'est-à-dire ce n'est pas le noyau parents-enfants. Ici, lorsque l'on parle de la famille, on inclut les grands-parents, les parents, les enfants, les cousin.e.s. Ils sont effectivement très nombreux notamment parce que, étant musulmans, les hommes peuvent avoir jusqu'à quatre femmes et chacune d'elle a généralement plusieurs enfants et vivent tous, dans la mesure du possible et de l'entente, sous le même toit. Chaque famille a un représentant officiel qui est très souvent le chef de famille. Ce sont eux qui ont pris la parole lors de notre arrivée. Leur discours est traduit par le Professeur Amidou Ba, instituteur de Ndadé pour les jeunes élèves de 3ème et 5ème secondaires. En effet, même si le français est considéré comme la langue officielle du Sénégal, c'est pourtant le wolof qui est parlé majoritairement dans le pays. J'ai pu aussi connaître le langage des Peuls. Ces derniers représentent l’un des plus grands peuples d’Afrique: ils sont plus de 20 millions, anciens éleveurs nomades islamisés qui parlent la même langue, partagent la même culture, avec des accents et des expressions différentes en fonction des régions.

Chef de la famille Sow
Ces chefs de famille sont des personnes d'un âge avancé, qui me confortent dans le stéréotype de "vieux sage". Leur prestance, leur beauté, leur attitude simple ajoutée d'un ton d'élégance avec leurs yeux d'une couleur intense, tout cet ensemble de détails a permis un échange symbolique. L'état second dans lequel ils m'avaient plongé lors de leur discours s'est envolé lorsque j'ai réalisé qu'autour de moi, autour de cette construction triviale, s'étaient rassemblés femmes et enfants, de tout âge. Après leurs remerciements, énoncés de maintes et maintes fois, l'ambiance était au rendez-vous. Les enfants ont couru jusqu'à des bidons vides, ce sont assis dessus et ont jovialement lancé un rythme dynamique en tapant des mains ou avec un bâton sur le dit bidon. Les femmes, ont formé un cercle tout autour de nous et poussaient les enfants à danser. La danse, a été le leitmotiv de nos rencontres avec les familles durant tout notre séjour au village. Chaque rassemblement et connaissance se partageait autour d'une danse et de beaucoup de rires et d'un peu de honte. Les jeunes filles et les femmes participaient volontairement à cette activité tandis que les hommes et même les petits garçons étaient en retrait. Certains d'entre-eux voulaient nous serrer la main, mais avaient une attitude assez craintive. Pour certains, il a fallu quelques jours d'adaptation pour se faire à l'idée de notre présence. Mais leur accueil était, sans l'ombre d'un doute, une vague chaleureuse de reconnaissance, d'entraide et de partage.

Danse 
Etymologiquement, Ndadé vient du prénom Dadé, en hommage à une femme enceinte ayant fondé le village de Ndadé en donnant naissance au premier villageois. Ndadé est donc dans la cambrousse de Potou. Les habitants vivent de l'agriculture, de l'élevage et des rentes de leurs terres. Ce n'est pas toujours suffisant, mais les sénégalais ont la vertu d'être généreux même lorsqu'ils sont eux-mêmes démunis. Alors, il est d'usage dans les campagnes que, lorsqu'une famille a terminé de manger, elle rassemble les restes (conséquents) et les apportent aux voisins. C'est un système sociétal basé sur l'entraide et non pas sur la compétition et l'individualité. Leurs maisons sont généralement faites de quatre façades en bétons, construites de plein pied. Ils ont également des huttes en bois où ils entreposent les outils ménagers/jardiniers quelconques et peut servir de cuisine également. Il y souvent une partie du terrain qui est consacrée à l'enclos des animaux tels que les chèvres, les ânes, les chevaux ou encore les moutons. Beaucoup se baladent librement sur le territoire de Ndadé tandis que d'autres restent attachés. Concernant l'arrivée d'eau, les bidons vides qui servaient à donner le rythme lors de nos danses quotidiennes sont, à la base, utilisés à ramener l'eau du puits qui se situe plus ou moins à une centaine de mètres de la nouvelle école et de la case de santé.

En avant plan, hutte en bois qui sert de rangements pour les outils ménagers ou autres. En second plan (en haut à droite) on retrouve une bâtisse d'une maison-type

Ayant mentionné la nouvelle salle de classe et la case de santé, il me tarde de vous parler prochainement de ce projet qui a pu se réaliser grâce à une équipe de jeunes motivés mais surtout grâce à des ouvriers d'une persévérance incroyable et d'un travail remarquable accompli sous le soleil doré du Sénégal. 

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